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HISTOIRE DE FRANCE

Rien n’était fini. Il n’était pas spécifié s’il gardait cette province comme gage ou comme acquisition ; quant à l’argent, il ne le tenait pas. D’autre part, l’affaire du pape était gâtée plus qu’arrangée. C’était un triste bonheur que la mort subite de Benoît XI[1].

Une disette, un imprudent maximum, une perquisition des blés, tout cela animait le peuple. On commençait à parler. Un clerc de l’Université parla haut et fut pendu. Une pauvre béguine de Metz, qui avait fondé un ordre de religieuses, eut révélation des châtiments que le ciel réservait aux mauvais rois. Charles-de-Valois la fit prendre, et pour lui faire dire que ces prophéties étaient soufflées par le diable, il lui fit brûler les pieds. Mais chacun crut à la prédiction, quand on vit, l’année suivante, une comète apparaître avec un éclat horrible[2].

Philippe-le-Bel était revenu vainqueur et ruiné. Il se rendit solennellement à Notre-Dame, parmi le peuple affamé et les malédictions à voix basse. Il entra à cheval dans l’église, et pour remercier Dieu d’avoir échappé quand les Flamands l’avaient surpris, il y voua dévotement son effigie équestre et armée de toutes pièces. On la voyait encore à Notre-Dame peu de temps avant la Révolution, à côté du colossal Saint Christophe.

Nogaret ne s’oublia pas ; il triompha aussi à sa manière. Nous avons quittance de lui, prouvant que ses appointements furent portés de cinq cents à huit cents livres[3].

  1. App. 39.
  2. C’est la comète de Halley, qui reparaît à des intervalles de soixante-quinze à soixante-seize ans. App. 40.
  3. D. Vaissette.