Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 4.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
143
LUTTE DES DEUX PARTIS. — CABOCHIENS

voleurs dont les squelettes branlaient encore à Montfaucon. Tout un peuple de prêtres, de moines, de clercs et d’écoliers, animés d’une joie frénétique, les mena à travers Paris jusqu’au parvis de Notre-Dame, où ils furent remis à la justice ecclésiastique, et déposés aux pieds de l’évêque[1]. Le prévôt demanda pardon aux recteurs, docteurs et régents[2]. Ce triomphe des deux cadavres, qui était l’enterrement de la justice royale, eut lieu au soleil de mai, attristé par la lueur des torches que portait tout ce monde noir.

Le 14 mai, la veille même de la grande victoire de l’Université, deux messagers du pape Benoît XIII avaient eu la hardiesse de venir braver dans Paris cette colérique puissance. Ils avaient apporté des bulles menaçantes où l’ennemi, qu’on croyait à terre, semblait plus vivant que jamais[3]. C’était un gentilhomme aragonais (comme son maître Benoît XIII) qui avait hasardé ce coup.

Une députation de l’Université vint à grand bruit demander justice. Une grande assemblée se fit à Saint-Paul en présence du roi, du duc de Bourgogne et des princes. Un violent sermon y fut prononcé par Courtecuisse, qui faisait le pendant du discours de Jean

  1. App. 107.
  2. « Messeigneurs, leur dit-il, se raillant de leur puissance et de leur obstination, outre le pardon que vous m’accordez, je vous ai grande obligation ; car lorsque vous m’avez attaqué, je me tins pour assuré d’être mis hors de mon état ; mais je craignais qu’il ne vous vint en idée de conclure aussi à ce que je fusse marié, et je suis bien certain que si une fois vous eussiez mis cette conclusion en avant, il m’aurait fallu, bon gré, mal gré, me marier. Par votre grâce, vous avez bien voulu m’exempter de cette rigueur, ce dont je vous remercie très humblement. » (Chronique, no 10297.)
  3. App. 108.