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CHARLES VII. — HENRI VI

et la nation. Le treizième siècle, le quatorzième, le quinzième prétendent à cette gloire. Le livre éclate au quinzième, et devient alors populaire ; mais il a bien l’air de partir de plus loin et d’avoir été préparé dans les siècles antérieurs.

Comment en eût-il été autrement ? Le christianisme, dans son principe même, n’est autre chose que l’imitation du Christ[1]. Le Christ est descendu pour nous encourager à monter. Il nous a proposé en lui le suprême modèle.

La vie des saints ne fut qu’imitation ; les règles monastiques ne sont pas autre chose. Mais le mot d’imitation ne put être prononcé que tard. Le livre que nous appelons ainsi, porte dans plusieurs manuscrits un titre qui doit être fort ancien : Livre de vie. Vie est synonyme de règle dans la langue monastique[2]. Ce livre n’aurait-il pas été, dans sa première forme, une règle des règles, une fusion de tout ce que chaque règle contenait de plus édifiant[3] ? Il semble particulièrement empreint de l’esprit de sagesse et de modération qui caractérisait le grand ordre, l’ordre de Saint-Benoît.

Ces maîtres expérimentés de la vie intérieure sen-

  1. L’antiquité avait entrevu l’idée de l’Imitation. Les pythagoriciens définissaient la vertu : Όμολογία πρὁς τὁ θεἵον ; et Pluton : Όμοίωσις θεῷ κατὰ τὸ δυνατόν (Timée et Théétète). Théodore de Mopsueste, plus stoïcien que chrétien, disait : « Christ n’a rien eu de plus que moi ; je puis me diviniser par la vertu. »
  2. Surtout chez les chanoines réguliers de Saint-Augustin. (Gence.)
  3. Ces Règles ne sont pas seulement des codes monastiques ; elles contiennent beaucoup de préceptes moraux et d’effusions religieuses. (Voy. passim les recueils d’Holstenius, etc.)