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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/269

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TROUBLES DE L’ANGLETERRE

brave, de belle taille[1], spirituel et passablement fol.

Cade, c’était son nom, trouva plaisant de faire le prince pour quelques jours ; il déclara s’appeler Mortimer. Cela était d’une audace incroyable, le personnage étant connu, et tout le monde sachant que Mortimer, le petit-fils d’Édouard III, était bien et dûment enterré. N’importe, il n’en ressuscita pas moins facilement ; le nouveau Mortimer réussit à merveille, il était amusant, entraînant, il jouait son rôle avec la vivacité irlandaise, bon prince, ami des braves gens, mais grand justicier… Il faisait les délices du peuple.

Avec le tact parfait qu’ont souvent les fols parlant à des fols, il fit une proclamation absolument absurde, et qui fut d’un effet excellent. Il y disait, entre autres choses, que selon le bruit public on voulait détruire tout le pays de Kent et en faire une forêt pour venger la mort de Suffolk sur les innocentes communes. Puis, venaient des protestations de dévouement au roi ; on souhaitait seulement que ce bon roi daignât s’entourer de ses vrais lords et conseillers naturels, les ducs d’York, d’Exeter, de Buckingham et de Norfolk. Cela était fort clair ; on voyait d’ailleurs parmi la canaille de Kent un héraut du duc d’Exeter et un gentilhomme du duc de Norfolk, qui suivaient le mouvement et avaient l’œil à tout.

Cade eut tout d’abord vingt mille hommes, et davantage en avançant. On envoya quelques troupes contre

  1. « A certaine yong man of a goodly stature, and pregnant wit. » (Hall and Grafton.)