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HISTOIRE DE FRANCE

armée, vînt faire sacrer le jeune Henri VI. Cette armée, Winchester l’avait toute prête ; chargé par le pape d’une croisade contre les Hussites de Bohême, il avait sous ce prétexte engagé quelques milliers d’hommes. Le pape lui avait donné l’argent des indulgences pour les mener en Bohême ; le conseil d’Angleterre lui donna encore plus d’argent pour les retenir en France[1]. Le cardinal, au grand étonnement des croisés, se trouva les avoir vendus ; il en fut deux fois payé, payé pour une armée qui lui servait à se faire roi.

Avec cette armée Winchester devait s’assurer de Paris, y mener le petit Henri, l’y sacrer. Mais ce sacre n’assurait la puissance du cardinal qu’autant qu’il réussirait à décrier le sacre de Charles VII, à déshonorer ses victoires, à le perdre dans l’esprit du peuple. Contre Charles VII en France, contre Glocester en Angleterre, il employa, comme on verra, un même moyen, fort efficace alors : un procès de sorcellerie.

Ce fut seulement le 25 juillet, lorsque depuis neuf jours Charles VII était bien et dûment sacré, que le cardinal entra avec son armée à Paris. Bedford ne perdit pas un moment ; il partit avec ces troupes pour observer Charles VII[2]. Deux fois ils furent en

  1. Rymer.
  2. Le défi de Bedford « à Charles-de-Valois » est écrit dans la langue dévote et dans les formes hypocrites qui caractérisent généralement les actes de la maison de Lancastre : « Ayez pitié et compassion du povre peuple chrestien… Prenez au pays de Brie aucune place aux champs… Et lors, si vous voulez aucune chose offrir, regardant au bien de la paix, nous laisserons et ferons tout ce que bon prince catholique peut et doit faire. » (Monstrelet.)