Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/80

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été si barbares qu’on ne peut avec certitude raconter leurs barbaries !… Tout au moins le désert raconte, et le désert du Languedoc, et les solitudes des Alpes, et les montagnes dépeuplées de la Bohême, tant d’autres lieux d’où l’homme a disparu, où la terre est devenue à jamais stérile, où la nature, après l’homme, semble exterminée elle-même.

Mais une chose crie plus haut que toutes les destructions (chose authentique celle-là), c’est que le système qui tuait au nom d’un principe, au nom d’une foi, se servit indifféremment de deux principes opposés, de la tyrannie des rois, de l’aveugle anarchie des peuples. En un siècle seulement, au seizième, Rome change trois fois, elle se jette à droite, à gauche, sans pudeur, sans ménagement. D’abord elle se donne aux rois ; puis elle se jette au peuple ; puis encore retourne aux rois. Trois politiques, un seul but, comment atteint ? Il n’importe. Quel but ? La mort de la pensée.

Un écrivain a trouvé que le nonce du pape n’a pas su d’avance la Saint-Barthélemy. Et moi j’ai trouvé que le pape l’avait préparée, travaillée dix ans.

« Bagatelle, dit un autre, simple affaire municipale, une vengeance de Paris. »

Malgré le dégoût profond, le mépris, le vomissement que me donnent ces théories, je les ai confrontées aux monuments de l’histoire, aux actes irrécusables. Et j’ai retrouvé de proche en proche la trace rouge du massacre. J’ai vérifié que, du jour où Paris proposa (1561) la vente générale des biens du