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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/139

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du prêtre et du magistrat, avec un reflet de Dieu !

Toujours le peuple avait adressé là ses vœux, ses soupirs ; avec quel succès, quel triste retour, on le sait de reste. La royauté avait beau le fouler, l’écraser, comme une machine impitoyable ; il l’aimait comme une personne.

Rien ne fut plus facile aux prêtres que de montrer en Louis XVI un saint, un martyr. Cette figure béate et paterne, lourde (comme maison de Saxe et comme maison de Bourbon), était un saint de cathédrale, tout fait pour un portail d’église. L’air myope, l’indécision, l’insignifiance, lui donnaient justement ce vague qui permet tout à la légende.

Texte admirable, pathétique, bien propre à troubler les cœurs. Il avait aimé le peuple, il voulait le bien du peuple, et il en était puni… Des ingrats, des forcenés, avaient osé lever la main contre cet excellent père, contre l’oint de Dieu !… Le bon roi, la noble reine, la sainte Madame Élisabeth, le pauvre petit dauphin, captifs dans cet affreux Paris ! Que de larmes à ces récits, que de vœux au ciel, de prières, de messes pour la délivrance ! Quel cœur de femme ne se brisait, lorsque, sortant de l’église, le prêtre tout bas lui disait : « Priez pour le pauvre roi ! » — Priez aussi pour la France, voilà ce qu’il fallait dire encore, priez pour un pauvre peuple, trahi, livré à l’étranger.

L’autre texte, non moins puissant pour exciter la guerre civile, c’était l’ouverture des couvents, l’ordre d’inventorier les biens ecclésiastiques, la réduction