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les familles des condamnés ne seraient nullement entachées par leur supplice. Le public, touché de la jeunesse et du malheur de ceux-ci, consola leurs honnêtes parents par mille témoignages d’intérêt : plusieurs citoyens honorables demandèrent leur sœur en mariage.

Plus de transmission du mérite, abolition de la noblesse. Plus de transmission du mal ; l’échafaud ne flétrit plus la famille ni les enfants du coupable.

Le principe juif et chrétien repose précisément sur l’idée contraire. Le péché y est transmissible. Le mérite aussi, celui du Christ, celui des saints, profite même aux moins méritants des hommes.

Dans la même séance où l’Assemblée décréta l’abolition de la noblesse, elle avait reçu une députation étrange qui se disait celle des députés du genre humain. Un Allemand du Rhin, Anacharsis Clootz (caractère bizarre sur lequel nous reviendrons), présenta à la barre une vingtaine d’hommes de toute nation dans leurs costumes nationaux, Européens, Asiatiques. Il demanda en leur nom de pouvoir prendre part à la fédération du Champ de Mars, « au nom des peuples, c’est-à-dire des légitimes souverains, partout opprimés par les rois ».

Tels furent émus, d’autres riaient. Cependant la députation avait un côté sérieux ; elle comprenait des hommes d’Avignon, de Liège, de Savoie, de Belgique, qui véritablement voulaient alors être Français. Elle comprenait des réfugiés d’Angleterre, de Prusse, de Hollande, d’Autriche, ennemis de leurs gouverne-