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hommes. Le préjugé, la tradition, étaient trop forts en faveur de ceux-ci : on n’attribuait aucun esprit militaire aux classes inférieures ; on ne devinait nullement la foule de vrais nobles qui se trouvaient dans le peuple.

Ce fut La Fayette qui, par son ami, le député Emmery, poussa l’Assemblée aux mesures fausses et violentes qu’elle prit contre l’armée, se faisant partie, et non juge. — Partie, au profit de qui ? De la contre-révolution.

Le 6 août, La Fayette fit proposer par Emmery, décréter par l’Assemblée, que, pour vérifier les comptes tenus par les officiers, le roi nommerait des inspecteurs choisis parmi les officiers, qu’on n’infligerait aux soldats de congés infamants qu’après un jugement selon les formes anciennes, c’est-à-dire porté par les officiers. Le soldat avait son recours au roi, c’est-à-dire au ministre (officier lui-même), ou bien à l’Assemblée nationale, qui apparemment allait quitter ses travaux immenses pour se faire juge des soldats.

Ce décret n’était qu’une arme qu’on se ménageait. On avait hâte de frapper un coup. Rendu le 6, il fut sanctionné le 7 par le roi. Le 8, M. de La Fayette écrivit à M. de Bouille, qui devait frapper le coup. C’est le mot même dont il se sert, qu’il répète plusieurs fois[1].

  1. Mémoires de La Fayette, lettre portant la date du 18 août 1790, t. III, p. 135. — Je regrette que les historiens français et suisses aient généralement ou omis ou défiguré l’affaire de Châteauvieux.