Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tère de Camille Desmoulins, autre boursier du clergé. Celui-ci était plus jeune, Danton à peu près de l’âge de Robespierre ; il suivait les mêmes classes.

Sept ans, huit ans, passent ainsi. Puis le droit, comme tout le monde, l’étude du procureur. Il y réussit fort peu ; quoique naturellement raisonneur et bon logicien, ami des abstractions, il ne pouvait se faire à la sophistique du barreau, aux subtilités de la chicane. Nourri de Rousseau, de Mably, les philosophes de l’époque, il ne descendait pas volontiers des généralités. Il lui fallut retourner à Arras, subir la vie de province. Lauréat de Louis-le-Grand, il fut bien reçu, eut quelque succès dans le monde, dans la littérature académique. L’académie des Rosati, qui pour prix de poésie donnait des roses, admit Robespierre. Il rimait tout comme un autre. Il concourut pour l’éloge de Gresset et eut l’accessit ; puis pour un sujet plus grave : la réversibilité du crime, la flétrissure des parents du criminel. Tout cela faiblement écrit, d’une sentimentalité pastorale. Le jeune auteur n’en avait fait qu’une plus tendre impression sur une demoiselle du lieu[1]. La demoiselle avait juré de n’en épouser jamais d’autre. En revenant d’un voyage, il la trouva mariée.

Le Clergé, naturellement fier d’un tel protégé, lui restait très favorable. Il avait obtenu de l’abbé de

  1. C’est d’elle, je pense, qu’il s’agit, dans la devise du premier portrait de Robespierre (collection de M. de Saint-Aubin) :

    Très jeune, lies mol, très fade, la rose à la main, l’autre main sur le cœur, et ce mot au bas : « Tout pour mon amie. »