Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/331

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entières immuablement assidu aux Jacobins, à l’Assemblée ; salles malsaines, étouffées, qui donnèrent à Mirabeau de graves ophtalmies, des hémorragies à Robespierre. Si j’en crois aux différences qu’on trouve entre ses portraits, son tempérament dut subir alors une assez grave altération. Sa figure, jusque-là encore assez jeune et douce, semble avoir séché. Une concentration extrême, une sorte de contraction en devient le caractère. Et il n’avait en effet rien de ce qui détend l’esprit. Son unique plaisir était de limer, polir ses discours assez purs, mais parfaitement incolores ; il se défit par le travail de sa facilité vulgaire et parvint peu à peu à écrire difficilement.

Ce qui le servit le plus, ce fut de se mettre hors de son propre parti, de se faire seul, une bonne fois, de rompre avec les Lameth, de ne point traîner la chaîne de cette équivoque amitié. Un matin que Robespierre était allé à l’hôtel Lameth, ils ne purent ou ne voulurent le recevoir ; il n’y revint plus.

Libre des hommes d’expédients, il se fit l’homme des principes.

Son rôle fut dès lors simple et fort. Il devint le grand obstacle de ceux qu’il avait quittés. Hommes d’affaires et de parti, à chaque transaction qu’ils essayaient entre les principes et les intérêts, entre le droit et les circonstances, ils rencontrèrent une borne que leur posait Robespierre, le droit abstrait, absolu. Contre leurs solutions bâtardes, anglo-françaises, soi-disant constitutionnelles, il présentait des