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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/338

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personnelle. Ils firent une démarche très grave, qui, pour ce moment, indique leur èloignement de Louis XVI, leur rapprochement du parti d’Orléans.

Le 30 octobre, les évêques avaient publié leur Exposition de principes, un manifeste de résistance, qui plaçait sous une sorte de Terreur ecclésiastique tout le clergé inférieur, ami de la Révolution. Le 31, par représailles, les Jacobins décidèrent qu’un journal serait créé pour publier par extraits la correspondance de la société avec celles des départements, publication formidable qui allait amener à la lumière une masse énorme d’accusations contre les prêtres et les nobles. Un tel journal, qui devait désigner tant d’hommes à la haine du peuple (qui sait ? peut-être à la mort), était, dans la réalité, une magistrature terrible ; l’homme qui devait choisir, extraire, dans ce pêle-mêle immense, les noms que l’on dévouait, allait être encore investi d’un étrange et nouveau pouvoir qu’on aurait pu appeler dictature de délation.

Les hauts meneurs des Jacobins étaient encore, à cette époque, Duport, Barnave et Lameth. Quel fut le grave censeur, l’homme irréprochable et pur, à qui ils firent confier ce pouvoir ?… Qui le croirait ? À l’auteur des Liaisons dangereuses, à l’agent connu du duc d’Orléans, à Choderlos de Laclos. — C’est lui qui, dans l’ombre même du Palais-Royal, à la porte de son maître, cour des Fontaines, publiait chaque semaine ce recueil d’accusations, sous le titre peu exact de Journal des Amis de la