Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/339

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constitution ; peu exact, car alors il ne donnait nullement les débats de la société de Paris, semblait en faire un mystère ; il publiait seulement les lettres qu’elle recevait des sociétés de province, lettres pleines d’accusations collectives et anonymes ; à quoi Laclos ajoutait quelque article, insignifiant d’abord, puis naïvement orléaniste, de sorte que, pendant sept mois (de novembre en juin), l’orléanisme courait la France sous le couvert respecté de la société jacobine. Cette grande machine populaire, détournée de son usage, jouait au profit de la royauté possible.

Les meneurs des Jacobins n’auraient pas fait sans doute cette étrange transaction, si les secours pécuniaires des Orléanistes ne leur eussent été indispensables dans les mouvements de Paris. La cour, qui voyait tout trop tard, commença à regretter de n’avoir fait aucun pas vers ces hommes dangereux. Elle s’adressa d’abord à la vanité bien connue de Barnave (décembre 1790), plus tard aux Lameth (avril 1791). Elle demanda des conseils à Barnave[1]. Elle en demandait à Mirabeau, à Bergasse, à tout le monde, et elle trompait tout le monde, n’écoutant, comme on verra, que Breteuil, le conseiller de la fuite, de la guerre civile et de la vengeance.

Le public n’était pas dans le secret de toutes ces vilaines intrigues. Mais, d’instinct, il les sentait. De quelque côté qu’il se tournât, il ne voyait rien

  1. Mémoires de Mirabeau, VIII, 362.