Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/50

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Voilà une bien terrible aristocratie, dans ces démocrates :

« Nous sommes des docteurs, nous ; le malade ne sait ce qu’il dit… Nous le guérirons, quoi qu’il fasse ; il sera bien content demain ; il ne lui en aura coûté que tel accessoire, un nez, un œil, une oreille, un bras, une jambe, la tête, à prendre les choses au pis ; eh bien, le tronc sera sauvé ! »

La situation était atroce ; mais elle était ridicule, c’est ce qui nous tira de là. Qui tuera le rire en France ? Il tuerait plutôt le reste.

Pendant que les faux Rousseau prouvent à la Convention, au nom des principes, qu’elle doit s’exterminer elle-même, pendant qu’elle baisse la tête et n’ose dire : « Non… » voici un incident grave : Voltaire ressuscite.

Béni sois-tu, bon revenant ! Tu nous viens en aide à tous. Nous étions bien embarrassés sans toi, personne ne pouvait arrêter la mort déchaînée au hasard. Les philanthropes du moment ont guillotiné la clémence ; ils ne savent plus eux-mêmes avancer ni reculer.

Le procès voltairien de la mère de Dieu (Catherine Théot), tombé dans la Convention, y soulève un rire immense… Miracle ! ces morts qui rient… Cette Assemblée condamnée, la tête sous le couteau, la mort dans les dents, s’oublie, elle éclate, ne peut se contenir. L’invincible torture du rire, lui donnant la question, suscite du fond de ses entrailles ce qui eût semblé éteint, perdu pour toujours, l’étincelle de