Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/10

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leur dire notre état moral, au moment où nous écrivions cette histoire que je réimprime.

Tel fut le cœur des pères aux Fédérations de 1790, tel fut celui des fils à nos banquets de Février. Journalistes, hommes politiques, professeurs, écrivains, nous en eûmes l’élan désintéressé, généreux, clément et pacifique, humain.

Deux choses originales ont marqué cette époque :

Premièrement l’horreur de l’argent. Il n’y a jamais eu un gouvernement si net, si pur, si économe. Tels de ses chefs resteront en légende par leur pauvreté obstinée. Plusieurs étaient des saints de modestie et d’abstinence. Je me rappelle encore, non sans émotion, avoir eu audience d’un de nos rois d’alors (Flocon) à son cinquième étage de la rue Thévenot.

L’idée dominante de tous, politiques, écrivains, était celle de garder à la jeune révolution un caractère constant de douceur et de clémence. Pour ma part, j’espérais que la jeunesse des écoles influerait beaucoup dans ce sens, pourrait s’interposer, neutraliser les chocs et les rendre moins rudes. C’est dans cette espérance, avec cette pensée intérieure, que j’avais fait et imprimé mon Cours de janvier 1848. Dans un sentiment analogue, les hommes de grand cœur qui eurent l’initiative de Février, aux célèbres banquets, portèrent, lurent les Fédérations, gardant, en plein combat, un sentiment de paix.

Telle fut la chance heureuse de ces premiers volumes, que toutes les nuances de la démocratie