paraît, au caractère, avoir été écrite par Robert, dont le nom se trouve au bas, avec ceux de Peyre, Vachart (ou Virchaux ?) et Dumont. Elle est toute vive, toute chaude, visiblement improvisée au Champ de Mars. Je la croirais volontiers dictée par Mme Robert (Mlle Kéralio), qui passa tout le jour sur l’autel avec son mari, avec une passion persévérante, à signer et faire signer. Le discours est coupé, coupé, comme d’une personne haletante. Plusieurs négligences heureuses, de petits élans dardés (comme la colère d’une femme ou celle du colibri), me sembleraient volontiers trahir la main féminine[1].
Suivent des milliers de signatures, remplissant plusieurs feuilles ou petits cahiers que l’on a cousus ensemble. Nul ordre. Visiblement chacun a signé à mesure qu’il arrivait, presque tous à l’encre, plusieurs au crayon. Beaucoup de noms sont connus, spécialement ceux de la section du Théâtre-Français (Odéon), qui étaient là en grand nombre : Sergent (le
- ↑ Spécialement à ce passage : « Mais, Messieurs, mais, représentants d’un peuple généreux et confiant, rappelez-vous », etc. (Voir l’original conservé aux archives de la Seine.) — J’avais cru d’abord voir les premiers cahiers tachés de sang ; mais c’est l’encre jetée par pâtés, qui, en s’évaporant, a laissé des traces d’un jaune rougeâtre. — La signature d’Hébert n’est point du tout en patte d’araignée, comme quelques-uns l’ont dit ; elle est peu allongée, plutôt basse et sans caractère, de tout point commune. — Parmi les signatures, il y a celles d’un ingénieur, de plusieurs mécaniciens, d’un peintre en miniature, celle d’une marchande de modes, Mme David, rue Saint-Jacques, n° 173 (écriture facile et jolie), celle d’un professeur (bien mal orthographiée) : Vinssent, professeurs de langue. — Autre encore, bizarre, mais énergiquement motivée : Je renonce au roy je ne le veux plus le conette pour le roy je suis sitoiien fransay pour la patry du bataillon de Boulogne Louis Magloire l’aîné à Boulogne. — La dernière signature est celle de Santerre, écrite à main posée, et probablement ajoutée le soir au faubourg Saint-Antoine, où, selon toute apparence, la pétition fut sauvée et cachée.