Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/219

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(depuis La Rochejaquelein) avait envoyé de Rome une dispense nécessaire. La dispense disait que le mariage ne pouvait être célébré que par un prêtre qui eût refusé ou rétracté le serment. Ce fut l’un des premiers actes écrits dans lesquels le pape exprima sa décision. Nombre de prêtres qui avaient juré se rétractèrent sur-le-champ.

Mais bien avant que le pape se fût ainsi déclaré, sa pensée était connue et comprise ; les agents du clergé agissaient avec adresse et mystère ; ils remuaient le peuple en dessous. Dans la Mayenne, par exemple, rien ne paraissait encore ; mais parfois, dans les clairières des bois, on trouvait de grands rassemblements de mille ou deux mille paysans. Pour quelle cause ? Personne n’aurait su le dire.

Le sabotier Jean Chouan ne sifflait pas encore ses oiseaux de nuit. Bernier ne prêchait pas encore la croisade dans l’Anjou. Cathelineau était encore un bon voiturier, honnête et dévot colporteur, qui doucement menait d’ensemble son petit commerce et les affaires du parti. Cependant, dans cette douceur, malgré les recommandations d’ajourner, d’attendre, il y avait des hommes impatients, des mains imprudentes, des vivacités irréfléchies. Près d’Angers, par exemple, un prêtre assermenté fut tué à coups de couteau. À Châlons des furieux escaladèrent le presbytère pour assassiner le curé. En Alsace, on n’employait pas le fer contre les prêtres citoyens ; on lâchait sur eux des dogues, pour les dévorer. Tous les soirs, dans les églises obscures, on chantait,