Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/236

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tune, voulant prospérer avec elle, ou avec elle périr.

Le choc du 21 juin, l’affaire de Varennes, les menaces de l’étranger, éprouvèrent leur foi robuste aux destinées de la Révolution. Ils ne bronchèrent pas, ne sourcillèrent pas. Le 21 même, on l’a vu, ils achetèrent, et fort cher, trois maisons du chapitre de Notre-Dame de Paris. Ainsi les Romains assiégés mirent en vente et vendirent aussi cher qu’en pleine paix le champ sur lequel Annibal était campé aux portes de Rome.

Les meneurs de l’Assemblée, dans le mouvement royaliste qu’ils s’efforçaient de lui imprimer, virent sans doute avec inquiétude cet élan populaire des ventes, que leur révélait à l’improviste le rapport du 26 août.

Le comité d’aliénation, qui avait fait ce rapport, s’en effraya lui-même, recula devant son succès. Il déclara abdiquer ses fonctions et demanda qu’elles fussent transférées au pouvoir exécutif. Proposition naïvement contre-révolutionnaire. Confier à un roi dévot le soin de vendre les biens du clergé, en charger un ministère inactif et paralytique, c’était annoncer assez qu’on ne se souciait nullement désormais d’accélérer l’opération.

Ce pas subitement rétrograde du comité, de l’Assemblée, leur effort pour s’arrêter court ou tirer à reculons, qu’indique-t-il ? La frayeur. Ils auront rencontré quelque objet terrible ; sur la route où ils cheminaient en sécurité, ils ont vu se dresser contre eux la pointe de l’invisible glaive.