Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/272

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somma la municipalité, au nom de la tolérance religieuse, de laisser aux prêtres rebelles la plus complète liberté de tenir leurs conciliabules partout où il leur plairait. Le jeune poète André Chénier, organe en ceci des Feuillants, des royalistes en général, réclama aussi la tolérance au nom de la philosophie. Il fut égalé, dépassé par l’évêque constitutionnel Torné, qui plaida pour ses ennemis devant l’Assemblée législative, avec une charité vraiment magnanime.

À ces apôtres de la tolérance, il y avait malheureusement une réponse à faire ; non un argument, mais un fait. Si les rebelles voulaient de la tolérance à Paris, ils n’en voulaient pas en France. Ils entendaient non pas être tolérés, mais régner et persécuter. Ils exerçaient une sorte de terreur sur les prêtres constitutionnels. Toutes les nuits on tirait des coups de fusil autour de leurs presbytères, et parfois dans leurs fenêtres. Le 16 octobre, en Beaujolais, le nouveau curé d’un village vit l’ancien, à la tête de cinq cents montagnards qu’il avait été chercher, envahir l’église et le chasser de l’autel. Ce vaillant prêtre s’empara de la caisse des pauvres, que le curé constitutionnel avait mise dans les mains de la municipalité. Beaucoup de prêtres effrayés, des magistrats municipaux même, donnaient leur démission. Ces derniers n’avaient aucun moyen d’assurer la paix publique, parmi ces foules furieuses qui confondaient le nouveau clergé et ses défenseurs dans les mêmes menaces de mort. Dans tels