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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/415

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plus. Le tort de ceux qu’on attaque, c’est de poursuivre incessamment ces fantômes qui reculent. Dans l’ardente poursuite des ombres, ils leur prêtent du corps, pour ainsi parler, les font passer pour réelles. C’est ainsi que les Girondins, impatients, inquiets dans leur provocante insistance, occupaient sans cesse le public de Robespierre et du secret de Robespierre qu’il ne voulait pas lâcher, le sommaient de s’expliquer, allaient ainsi le grandissant, le désignant de plus en plus pour chef à toutes les haines, à toutes les jalousies, à tous les mécontentements. Ils lui reprochent de devenir l’idole du peuple et, par cet imprudent aveu, augmentent l’idolâtrie. Lui, il ne donne aucune prise, ne faisant rien en réalité et ne disant rien au fond. Il va toujours reculant, et, reculant, il grandit. Par exemple, quand Guadet, avec un mélange de haine et de respect, dit qu’un tel homme, par amour pour la liberté, devrait s’imposer l’ostracisme, il lui donna une belle prise : « Ah ! que l’égalité soit affermie, que les intrigants disparaissent, moi-même je fuirai la tribune… Heureux de la félicité de mes concitoyens, je passerai des jours paisibles dans les délices d’une sainte et douce intimité… » Et ailleurs : « Si l’on m’impose le silence, je quitterai cette société, pour m’enfermer dans la retraite. » Voix glapissantes de femmes : « Nous vous suivrons ! nous vous suivrons ! » — Et les mêmes voix aux adversaires : « Scélérats ! coquins ! »

Robespierre était né prêtre ; les femmes l’aimaient