d’avril et de mai. Il va soulever « le voile qui couvre d’affreux complots ». Il démasquera les traîtres, non pas aujourd’hui encore, c’est trop tôt, mais prochainement. Il a dans la main des secrets terribles qu’il pourrait bien révéler… Le jour viendra où il dévoilera un système de conspiration… Toute l’assistance, impatiente, est suspendue à ses lèvres, se croyant toujours au moment de voir le pâle et mystérieux orateur éclater enfin, et, d’un jour vengeur, illuminer les ténèbres où les traîtres s’enveloppent.
De temps à autre, des enfants perdus lancent quelque dénonciation, un morceau pour faire attendre, que happe la foule béante. C’est Simon (du Rhin) qui dénonce les feuillants de son pays. C’est l’ex-capucin Chabot, obscène, ignoblement farceur, qui amuse le public des plans de Mme Canon (il raille ainsi, à sa manière, la trop belliqueuse Madame de Staël). Chabot déclare hardiment que Narbonne sera protecteur ; Fauchet y travaille. Et c’est encore Chabot, qui, sans s’inquiéter de se contredire, veut que le même Fauchet appelle à la dictature précisément les Girondins qui viennent de chasser Narbonne et de s’y substituer.
Nous entrons dans une ère nouvelle, où la calomnie va marcher avec une force, une audace, j’allais dire une grandeur, dont nulle époque n’a montré l’équivalent. Elle triomphe, elle est chez elle ; elle marche, comme vertu civique. Jamais des faits, jamais des preuves ; les dires vagues d’un ennemi, c’est toujours assez pour satisfaire des imaginations haineuses qui ont besoin de haïr encore