Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/448

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porter bien haut dans cette guerre le drapeau de la liberté. Loin de là, ce fut une guerre politique, préparée, menée par un homme sans foi, qui pourtant n’avait de chance sérieuse de succès que dans la foi. Il exploitait un principe, pour que ce principe triomphant aux Pays-Bas lui servît à neutraliser le même principe en France.

Et à qui remettait-il le drapeau de la Révolution ? À celui qui, au Champ de Mars, l’avait abattu de l’autel de la Patrie, traîné dans le sang. Ce drapeau où la Gironde voyait d’avance celui de la République, il était confié par un royaliste à un royaliste, par un intrigant à un incertain, par l’homme faux à l’homme vague, pour revenir ici comme drapeau de la royauté. Bizarre, immorale conception, qui, si elle eût pu réussir, eût fait le succès, non de Dumouriez, non de La Fayette, mais de la contre-révolution et des ennemis de la France.

On put, dès l’entrée en campagne, se convaincre du danger énorme qu’il y avait à administrer la guerre par les partisans de la paix. Dumouriez, le ministre dirigeant, qui gouvernait le ministère de la guerre par son homme, le faible De Grave, avait, par égard pour la cour, gardé tout l’ancien personnel de cette administration. Ces employés de l’Ancien-Régime ne pouvaient montrer grand zèle pour le succès de la croisade révolutionnaire qui, dans la réalité, se faisait contre leurs principes. Leur mauvaise volonté, leur empressement à s’excuser sur la désorganisation des services, à