se sentaient une foi. La foi révolutionnaire, formulée par un homme du Nord dans la Marseillaise, avait confirmé le cœur du Midi. Tous maintenant, ceux même qui ignoraient le plus les lois de la Révolution, ses réformes et ses bienfaits, tous savaient, par une chanson, pourquoi ils devaient dès lors combattre, tuer, mourir. La petite bande des Marseillais, traversant villes et villages, exalta, effraya la France par son ardeur frénétique à chanter le chant nouveau. Dans leurs bouches, il prenait un accent très contraire à l’inspiration primitive, accent farouche et de meurtre ; ce chant généreux, héroïque, devenait un chant de colère ; bientôt il allait s’associer aux. hurlements de la Terreur.
Barbaroux et Rebecqui allèrent recevoir les Marseillais à Charenton. Le premier, jeune, enthousiaste, généreux, lié d’une part aux Girondins par l’amitié des Roland, d’autre part fort intime avec ces hommes violents du Midi, rêvait une grandiose et pacifique insurrection, une redoutable fête, où quarante mille Parisiens, accueillant les Marseillais, et, pour ainsi parler, les prenant dans leurs bras, emporteraient d’un élan, sans avoir besoin de combat, l’Hôtel de Ville, les Tuileries, entraîneraient l’Assemblée, fonderaient la République. « Cette insurrection pour la liberté eût été majestueuse comme elle, sainte comme les droits qu’elle devait assurer, digne de servir d’exemple aux peuples ; pour briser leurs fers, il leur suffit de se montrer aux tyrans. »
Santerre promit les quarante mille hommes, et il