Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/83

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Elles les suivent, ces discours, vont les entendre aux tribunes ; elles siègent, juges passionnés, elles soutiennent de leur présence l’orateur faible ou timide. Qu’il se relève et regarde… N’est-ce pas là le fin sourire de Mme de Genlis, entre ses séduisantes filles, la princesse et Paméla ? Et cet œil noir, ardent de vie, n’est-ce pas Madame de Staël ? Comment faiblirait l’éloquence ?… Et le courage manquera-t-il devant Madame Roland ?

Parmi les femmes de lettres, nulle peut-être ne s’avança d’une ardeur plus impatiente qu’une petite dame bretonne, vive, spirituelle, ambitieuse, Mlle Kéralio. Elle avait été longtemps retenue dans une vie de labeur. Formée par un père homme de lettres et professeur à l’École militaire, elle avait beaucoup traduit, compilé, écrit même une grande histoire, celle de l’époque antérieure aux Stuarts de mistress Macaulay, l’histoire du règne d’Élisabeth. Elle épousa un patriote plus ardent que distingué, le Cordelier Robert, et elle lui fit écrire, dès janvier 1791 : Le Républicanisme adapté à la France. Elle figurait en première ligne sur l’autel de la Patrie, dans la terrible scène du Champ de Mars que nous devons raconter.

Une autre femme de lettres, la brillante improvisatrice, Olympe de Gouges, qui, comme Lope de Vega, dictait une tragédie par jour, sans savoir, dit-elle, ni lire ni écrire, se déclara républicaine, sous l’impression de Varennes et de la trahison du roi. Avant elle était royaliste, et elle le rede-