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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/82

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Le commencement fut beau. Les femmes, on l’a trop oublié, entrèrent dans les pensées de la liberté, sous l’influence de l’Émile, c’est-à-dire par l’éducation, par les espérances, les vœux de la maternité, par toutes les questions que l’enfant soulève dès sa naissance en un cœur de femme, que dis-je ? dans un cœur de fille, bien longtemps avant l’enfant : « Ah ! qu’il soit heureux cet enfant ! qu’il soit bon et grand ! qu’il soit libre !… Sainte liberté antique, qui fis les héros, mon fils vivra-t-il dans ton ombre ?… » Voilà les pensées des femmes, et voilà pourquoi, dans ces places, dans ces jardins où l’enfant joue sous les yeux de sa mère ou de sa sœur, vous les voyez rêver et lire… Quel est ce livre que la jeune fille, à votre approche, a si vite caché dans son sein ? Quelque roman ? L’Héloïse ? Non, plutôt les Vies de Plutarque ou le Contrat social.

Une légende anglaise circulait, qui avait donné à nos Françaises une grande émulation politique. Mistress Macaulay, l’éminent historien des Stuarts, avait inspiré au vieux ministre Williams tant d’admiration pour son génie et sa vertu que, dans une église même, il avait consacré sa statue de marbre comme déesse de la Liberté.

Peu de femmes de lettres alors qui ne rêvent d’être la Macaulay de la France. La déesse inspiratrice se retrouve dans chaque salon. Elles dictent, corrigent, refont les discours qui, le lendemain, seront prononcés aux clubs, à l’Assemblée nationale.