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pelotons de Suisses ou de grenadiers des Filles-Saint-Thomas, qui les surveillaient, le sabre nu, et se tenaient prêts à tomber sur eux. Ces canonniers se voyaient d’ailleurs placés juste sous les balcons dont le feu plongeait sur eux. Plusieurs fois ils essayèrent d’écarter la batterie ; autant de fois l’état-major les remit au point où il pouvait toujours les écraser à plaisir.

Qui commandait dans le château ? Les gardes nationaux ne connaissaient d’autre chef que Mandat. La Commune le fit appeler. Son instinct lui disait de ne pas s’y rendre. Au second appel, il hésita, consulta autour de lui. Les ministres l’engageaient à ne point obéir. Le constitutionnel Rœderer lui dit qu’aux termes de la loi, le commandant de la garde nationale était aux ordres de la municipalité. Dès lors, il ne résista plus. Il lui parut qu’en effet il lui fallait éclaircir l’affaire des canons du Pont-Neuf, et sans doute aussi s’assurer du poste qu’il avait mis à la Grève pour attaquer, écraser le faubourg à son passage. Donc il se raisonna lui-même, étouffa ses pressentiments, fit un effort et partit.

Son départ ébranlait la défense du château. Il laissait le commandement à un officier fort peu rassuré. La reine, qui n’était pas non plus sans pressentiments, prit Rœderer à part et lui demanda ce qu’il pensait qu’il y eût à faire.

Et, justement pendant ce temps, les conseillers de la reine avaient fait, à l’insu des ministres, la chose la plus imprudente. À cette garde nationale flottante