Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/61

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n’oubliez pas de chasser vos calotins du château… »

Un autre garde national (quelques-uns disent que c’était l’homme même à la longue perche, qui semblait si furieux) s’émut de voir le dauphin, pressé de la foule, à ce passage si étroit ; il le prit dans ses bras et l’alla poser sur le bureau des secrétaires. Tout le monde applaudissait.

Le roi et la famille royale s’étaient assis sur les sièges peu élevés qu’occupaient ordinairement les ministres. Il dit à l’Assemblée : « Je suis venu ici pour éviter un grand crime… » — Parole injuste et dure que rien ne justifiait. La foule avait envahi, le 20 juin, les Tuileries, sans péril pour Louis XVI, et le 10 août même rien n’annonce que personne en ait voulu à ses jours ni même à ceux de la reine.

Le président Vergniaud ayant répondu que l’Assemblée « avait juré de mourir en soutenant les droits du peuple et les autorités constituées », le roi monta et vint s’asseoir à côté de lui. Mais un membre fit observer que la constitution défendait de délibérer en présence du roi. L’Assemblée désigna alors la loge du logographe, qui n’était séparée de la salle que par une grille en fer et se trouvait au niveau des rangs élevés de l’Assemblée. Le roi y passa avec sa famille ; il s’y plaça sur le devant, indifférent, impassible ; la reine, un peu sur le côté, pouvait cacher à cette place la terrible anxiété où la mettait le combat. On entendait à ce moment la meurtrière fusillade qui jeta d’abord par terre tant d’hommes