Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/180

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d’autre effet que de lui valoir une pension de douze mille livres que lui donna le roi de Prusse.

Pour les deux autres qui s’offrirent, c’étaient deux personnes qui, à divers titres, avaient bien mérité de la Révolution, et qui n’avaient nullement à se louer de la cour. Moins heureux que le royaliste, ils n’eurent d’autre récompense de leur courage que la guillotine.

Le premier c’était Malesherbes.

L’autre était une femme, la brillante improvisatrice méridionale dont nous avons parlé déjà, Olympe de Gouges.

Je dirai ici même, sans ajourner davantage, ce que j’ai à dire sur la destinée de ces généreuses personnes, je n’attendrai pas jusqu’à la fin de 1793 ; ils passeraient dans la foule, mêlés à tant d’autres, sur le fatal tombereau. Je veux les mettre ici à part. Là où ils furent héroïques, là aussi qu’ils reçoivent ce qui leur revient de larmes.

Malesherbes était, comme on sait, de cette famille Lamoignon, laborieuse entre toutes, qui travailla utilement, sous Louis XIV, à la réforme des lois, famille honnête, n’eût été la bassesse servile de son dévouement monarchique. Malesherbes était petit-neveu de ce Lamoignon de Basville, le tyran du Languedoc, le bourreau des protestants, qui couvrit ce pays de potences, de roues, de bûchers. Le neveu, pour cela même sans doute, fut philosophe, se jeta dans l’excès contraire, et, si j’en crois l’un de ses plus intimes amis, dépassa l’incrédulité des plus incrédules.