Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/229

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cration… Elle le vit et s’y jeta, et crut avoir sauvé la France, si, en se précipitant, elle emportait le roi et la royauté dans l’abîme.

Nous devions ce solennel hommage au courage héroïque, au dévouement des deux partis. Tous, Montagnards et Girondins, ils ont su parfaitement qu’ils se vouaient à la mort. Et ils ont cru mourir pour nous.

Cela dit et la dette payée, déclarons-le hardiment : les deux partis se trompèrent.

La Montagne se trompa sur l’effet que devait produire la mort de Louis XVI.

Les rois furent sans doute indignés, blessés en leur orgueil par la punition d’un des leurs. Mais leur intérêt politique y trouvait son compte. Un roi tué n’était pas chose nouvelle ; Charles Ier avait péri sans que la religion monarchique en fût ébranlée. Louis XVI, en périssant, rendit force à cette religion. Avilie par le caractère des rois du dix-huitième siècle, elle avait grand besoin d’un saint, d’un martyr. Cette institution usée a survécu par deux légendes : la sainteté de Louis XVI, la gloire de Napoléon.

La mort de Louis XVI était si bien dans l’intérêt des rois (dans leur secret désir peut-être ?) qu’ils ne purent se décider à faire la moindre démarche, de bienséance du moins, pour paraître s’intéresser à lui.

Le roi d’Espagne son cousin ne remua pas. Il y eut une lettre, tardive, du chargé d’Espagne, M. Ocariz, mouvement spontané, honorable, du cœur espagnol,