Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/302

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S’il n’était plus religion, il n’était rien. Restait à l’éliminer, comme un corps étranger placé dans les chairs, qui, tant qu’il reste là, y maintient la fièvre ; c’est ce que malheureusement fit trop lentement la Révolution.

L’Assemblée constituante, au moment où elle fit la division départementale, énerva, annula d’avance les directoires des départements (nos préfectures d’aujourd’hui), et concentra la force réelle dans les municipalités. En cela, elle servit puissamment la Révolution. Ces directoires, toujours entre les mains des notables, étaient naturellement des nids d’aristocratie. Les municipalités, au contraire, allèrent se démocratisant sous l’action incessante des sociétés patriotiques.

Le roi, dès 1789, n’existe plus que comme obstacle. Le nouveau souverain, le peuple, n’est pas organisé encore de manière à agir d’ensemble, à manifester au dehors l’unité qui réside en lui. Une municipalité supplée, dans l’entr’acte : une ville reine au défaut du roi. La ville de Paris est, en quelque sorte, le pouvoir exécutif de la France ; c’est elle qui manifeste et maintient la force d’unité centrale sans laquelle la France eût péri.

Paris a fait de grandes fautes ; elles sont présentes à ma mémoire. Eh bien, avec toutes ses fautes, quand je songe à ce qu’il a fait pour les libertés de l’espèce humaine, il me prend envie de baiser les pierres de ses monuments et les pavés de ses rues.