Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/48

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intérieures que nous allons signaler ; ils se résolvaient en individus. Ce parti tombait en poudre.

L’éclatante individualité de tels et tels Girondins ne contribuait pas peu à cette dissolution. Vergniaud planait dans des hauteurs inaccessibles à ses amis, et il était seul. Le sombre Isnard, enveloppé de son fanatisme, restait sauvage, insociable. Madame Roland, qui, à tant de titres, pouvait attirer, retenir, lier les hommes par le culte commun qu’on avait pour elle, était hautaine et souvent dure ; sa pureté ne pardonnait rien ; son courage ne ménageait rien ; tous approchaient, mais avec crainte ; environnée, admirée, elle était seule ou presque seule.

On peut dire la même chose de cet étrange Fauchet, le mystique, le philosophe, le tribun, le prêtre, tête chimérique, n’ayant ni tenue ni mesure, souvent vulgaire ou ridicule ; parfois, quand l’éclair le frappait, transfiguré dans la lumière et parlant comme Isaïe… Un fol ? un prophète ? L’un et l’autre, mais incapable, à coup sûr, d’entraîner personne. Qui l’aurait suivi ? les curieux ? ou peut-être les petits-enfants ?


La Gironde, nommée je ne sais pourquoi la Gironde, comprenait tout élément, toute province, toute opinion. Il n’y avait que trois hommes de Bordeaux ; les autres n’étaient même pas tous méridionaux ; à côté des Provençaux, des Languedociens, il y avait des Parisiens, des Normands, des Lyonnais, des Genevois.

Les professions n’étaient guère moins diverses.