Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/50

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la Montagne, furent si cruellement mordus qu’ils durent sentir à jamais la brûlure dans la morsure. Danton surtout était atteint, et de part en part ; on lui arrachait son mystère, son masque d’audace ; le noël impitoyable le réduisait, dans la Passion, au rôle de Ponce-Pilate, qui se lave les mains et ne dit : ni oui ni non.

Esprit légiste, esprit scribe, deux maladies de la Gironde. Une troisième, c’était le très mauvais héritage des factions du Midi. Les Provençaux Barbaroux, Rebecqui, ces violents modérés de la Convention, dont les paroles étourdies compromirent plus d’une fois les affaires de la Gironde, la compromettaient plus directement encore par leur étroite intimité avec les hommes d’Avignon. Ceux-ci, très ardents Français, ardents révolutionnaires, avaient donné leur pays à la France, à quel prix affreux, on le sait. Barbaroux, à la tête de ses Marseillais, avait ramené triomphants dans Avignon ces hommes de la Glacière, les Duprat, Mainvielle, Jourdan. Et en récompense ils avaient aidé l’élection de Barbaroux, lui avaient donné les voix d’Avignon. Quand celui-ci réclamait contre les hommes de septembre, ils auraient bien pu lui répondre : « Et vous ? qui vous a élu ? »

Les vieilles rancunes du Midi se mêlaient indiscrètement aux questions générales. Le rapporteur qui avait obtenu de la Législative l’amnistie d’Avignon était le protestant Lasource, illustre pasteur des Cévennes, éloquent, honnête, sincèrement fana-