minante, pour mieux dire, la seule (dans l’absence de Collot d’Herbois). La société pouvait avoir un moment d’infidélité ; au fond, elle était son épouse et elle lui appartenait. On l’avait vu spécialement au 19 octobre, jour de crise où Robespierre, attaqué de deux côtés, comme patron du modérantisme à Lyon et des hébertistes en Vendée, atteint en deux sens opposés et par Dubois-Crancé et par Phelippeaux, aurait péri dans l’éclat d’une telle inconsistance, s’il n’eût été raffermi sur l’inébranlable base de la fidélité jacobine. La société ne voulut rien voir ni savoir. Elle fut volontairement sourde, aveugle, et garda son dieu.
Elle avait fort changé, mais au profit de Robespierre. Dépouillée de ses grands hommes, recrutée de gens peu connus, elle avait sa force et sa gloire uniquement dans son grand Maximilien. Elle dépendait de lui bien autrement qu’à l’époque où d’autres influences contre-balançaient la sienne. On était très sûr d’avance que l’épuration jacobine serait l’épuration de Robespierre et de lui seul ; que sa voix, dans un sens ou l’autre, déciderait, trancherait tout, qu’il ferait rayer qui il lui plairait. Condition vraiment effrayante pour tous ceux qui, comme Danton, Desmoulins, étaient Jacobins amateurs, sans assiduité et sans influence. Ce n’était pas petite chose d’être rayé des Jacobins. La redoutable société, en gardant les formes d’un club, était en réalité un grand jury d’accusation. Sa liste était le livre de mort ou de vie. Le sort de Brissot le disait assez.