Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/312

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Ces fleuves vivants de peuple, ces rivières de fleurs, confluèrent comme une mer aux Tuileries. Jamais plus charmant iris ne sourit sous un plus beau ciel. Devant le sombre palais, un long portique improvisé offrait des arcades en guirlandes (combien plus gaies et plus aimables que ces lampions fumeux dont on attriste nos fêtes !).

Au milieu, montant du parterre jusqu’au balcon sous l’Horloge, un vaste amphithéâtre attendait la Convention. Une tribune s’en détachait et planait sur les gradins. Grand sujet de discussion et de conjectures dans le peuple. Il était difficile de croire qu’une voix d’homme entreprît de discourir dans un lieu tellement immense ; beaucoup supposaient que c’était un trône, ou que, si on parlait de là, c’était pour proclamer un mot : « Grâce pour tous ! » par exemple. « La Révolution est finie », etc.

Quelle serait la mesure de l’audace de Robespierre ? Hasarderait-il ce miracle ? ou bien resterait-il dans la fatalité du temps ?

Sans nul doute, pour en sortir, pour répondre à la pensée populaire, il fallait faire au terrorisme une hasardeuse surprise, dangereuse non pour lui seulement, mais pour la Révolution. Robespierre ne l’osa point.

Loin de là, préoccupé de rassurer les terroristes et de leur donner un gage, sous le prétexte de voir le peuple et les apprêts de la fête il alla au pavillon de Flore déjeuner chez Vilatte, juré révolutionnaire