Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/340

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pour la Révolution. Dans le Jura, par exemple, il imposa royalement silence au représentant Bernard (de Saintes). Cette scène, très saisissante, donna aux contre-révolutionnaires du Jura une confiance illimitée. Ils disaient légèrement (un des leurs, Nodier, le rapporte) : « Nous avons la protection de MM. de Robespierre. »

À Paris, Robespierre jeune fréquentait une maison infiniment suspecte du Palais-Royal, en face du Perron même, au coin de la rue Vivienne, l’ancien hôtel Helvétius. Le Perron était, comme on sait, le centre des agioteurs, tripoteurs de bourse, des marchands d’or et d’assignats, des marchands de femmes. De somptueuses maisons de jeu étaient tout autour, hantées des aristocrates. J’ai dit ailleurs comment tous les vieux partis, à mesure qu’ils se dissolvaient, venaient mourir là, entre les filles et la roulette. Là finirent les constituants, les Talley ranci, les Chapelier. Là traînèrent les Orléanistes. Plusieurs de la Gironde y vinrent. Robespierre jeune, gâté par ses missions princières, aimait aussi à retrouver là quelques restes de l’ancienne société.

La maison où il jouait était tenue par deux dames royalistes, fort jolies, la fille de dix-sept ans, la mère n’en avait pas quarante. Celle-ci, Mme de Saint-Amaranthe, veuve, à ce qu’elle disait, d’un garde du corps qui se fit tuer au 6 octobre, avait marié sa fille dans une famille d’un nom fameux de police, au jeune Sartine, fils du ministre de la Pompadour, que Latude a immortalisé.