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parole : « Qui ne pleurerait sur la patrie ? Hier, un membre du gouvernement s’en est isolé ; aujourd’hui un autre. Que le rideau soit déchiré ! »

Billaud et les Comités entraient à l’instant, avertis à peine à midi par une lettre de Saint-Just, le trouvant à la tribune, furieux de son manquement de parole, qui leur fit croire qu’il voulait les pousser à mort. Impatients d’étouffer sa voix, se croyant perdus s’il parlait, Billaud interrompit Tallien : « Hier, des hommes aux Jacobins ont dit vouloir égorger la Convention nationale !… En voilà un sur la Montagne… Je le reconnais. »

« Arrêtez-le ! arrêtez-le ! » Ce cri part de tous les bancs. Quand une Assemblée, émue de son péril, est lancée ainsi habilement dans un élan de violence, elle peut aller très loin. La chasse aux hommes une fois commencée, il est facile de la pousser. Ceci fut un coup décisif qui peut-être emporta tout.

« L’Assemblée jugerait mal, si elle se dissimulait qu’elle est entre deux égorgements… Elle périra si elle est faible… »

« Non, non ! » s’écrient tous les membres en se levant à la fois et agitant leurs chapeaux.

Ces spectacles ne manquent guère leur effet. Les tribunes se lèvent d’un même mouvement et crient : « Vive la Convention ! vive le Comité de salut public. »

Lebas veut parler, s’agite… Il est rappelé à l’ordre. Plusieurs crient : « À l’Abbaye. »