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Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/381

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bruyante canaille, jusqu’au dernier marmiton, donne la chasse au « cocu[1] ! »


Cet homme-là aurait crevé, s’il n’espérait dans le démon. Il rentre seul. Est-elle vide, cette maison désolée ? Non, il y trouve compagnie. Au foyer, siège Satan.

Mais bientôt elle lui revient, la pauvre, pâle et défaite, hélas ! hélas ! en quel état !… Elle se jette à genoux, et lui demande pardon. Alors, le cœur de l’homme éclate… Il lui met les bras au cou. Il pleure, sanglote, rugit à faire trembler la maison…

Avec elle pourtant rentre Dieu. Quoi qu’elle ait pu souffrir, elle est pure, innocente et sainte. Satan n’aura rien pour ce jour. Le Pacte n’est pas mûr encore.

Nos fabliaux ridicules, nos contes absurdes, supposent qu’en cette mortelle injure et toutes celles qui suivront, la femme est pour ceux qui l’outragent, contre son mari ; ils nous feraient croire que, traitée brutalement, et accablée de grossesses, elle en est heureuse et ravie. — Que cela est peu vraisemblable ! Sans doute la qualité, la politesse, l’élégance, pouvaient la séduire. Mais on n’en prenait pas la peine. On se serait bien moqué de celui qui,

  1. Rien de plus gai que nos vieux contes ; seulement ils sont peu variés. Ils n’ont que trois plaisanteries : le désespoir du cocu, les cris du battu, la grimace du pendu. On s’amuse du premier, on rit (à pleurer) du second. Au troisième, la gaieté est au comble ; on se tient tes côtes. Notez que les trois n’en font qu’un. C’est toujours l’inférieur, le faible qu’on outrage en toute sécurité, celui qui ne peut se défendre.