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Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/432

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gères et bonnes à manger (les aubergines, les tomates, mal appelées pommes d’amour). D’autres de ces innocentes sont le calme et la douceur même, les molènes (bouillon blanc), si utiles aux fomentations.

Vous rencontrez au-dessus une plante déjà suspecte, que plusieurs croyaient un poison, la plante miellée d’abord, amère ensuite, qui semble dire le mot de Jonathas : « J’ai mangé un peu de miel, et voilà pourquoi je meurs. » Mais cette mort est utile, c’est l’amortissement de la douleur. La douce-amère, c’est son nom, dut être le premier essai de l’homœopathie hardie, qui, peu à peu, s’éleva aux plus dangereux poisons. La légère irritation, les picotements qu’elle donne purent la désigner pour remède des maladies dominantes de ce temps, celles de la peau.

La jolie fille désolée de se voir parée de rougeurs odieuses, de boutons, de dartres vives, venait pleurer pour ce secours. Chez la femme, l’altération était encore plus cruelle. Le sein, le plus délicat objet de toute la nature, et ses vaisseaux qui dessous forment une fleur incomparable[1], est, par la facilité de s’injecter, de s’engorger, le plus parfait instrument de douleurs. Douleurs âpres, impitoyables, sans repos. Combien de bon cœur elle eût accepté tout poison ! Elle ne marchandait pas avec la sorcière, lui mettait entre ses mains la pauvre mamelle alourdie.

  1. Voir la planche d’un excellent livre, lisible aux demoiselles même, le Cours de M. Auzoux.