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C’est la Vierge, c’est Béatrix stérile, et qui meurt jeune.

Une belle demoiselle anglaise passa, dit-on, en France vers 1300, pour prêcher la rédemption des femmes. Elle-même s’en croyait le Messie.


La Messe noire, dans son premier aspect, semblerait être cette rédemption d’Ève, maudite par le christianisme. La femme au sabbat remplit tout. Elle est le sacerdoce, elle est l’autel, elle est l’hostie, dont tout le peuple communie. Au fond, n’est-elle pas le Dieu même ?


Il y a là bien des choses populaires, et pourtant tout n’est pas du peuple. Le paysan n’estime que la force ; il fait peu de cas de la Femme. On ne le voit que trop dans toutes nos vieilles Coutumes (Voy. mes Origines). Il n’aurait pas donné à la Femme la place dominante qu’elle a ici. C’est elle qui la prend d’elle-même.

Je croirais volontiers que le sabbat, dans la forme d’alors, fut l’œuvre de la Femme, d’une femme désespérée, telle que la sorcière l’est alors. Elle voit, au quatorzième siècle, s’ouvrir devant elle son horrible carrière de supplices, trois cents, quatre cents ans illuminés par les bûchers ! Dès 1300, sa médecine est jugée maléfice, ses remèdes sont punis comme des poisons. L’innocent sortilège par lequel les lépreux croyaient alors améliorer leur sort, amène le massacre de ces infortunés. Le pape Jean XXII fait