Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/502

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Les choses allèrent si loin, chez ces bons princes-évêques, que plus tard l’empereur le plus bigot qui fut jamais, l’empereur de la guerre de Trente-Ans, Ferdinand II, est obligé d’intervenir, d’établir à Bamberg un commissaire impérial pour qu’on suive le droit de l’Empire, et que le juge épiscopal ne commence pas ces procès par la torture qui les tranchait d’avance, menait droit au bûcher.


On prenait les sorcières fort aisément par leurs aveux, et parfois sans tortures. Beaucoup étaient de demi-folles. Elles avouaient se transformer en bêtes. Souvent les Italiennes se faisaient chattes, et, glissant sous les portes, suçaient, disaient-elles, le sang des enfants. Au pays des grandes forêts, en Lorraine et au Jura, les femmes volontiers devenaient louves, dévoraient les passants, à les en croire (même quand il ne passait personne). On les brûlait. Des filles assuraient s’être livrées au Diable, et on les trouvait vierges encore. On les brûlait. Plusieurs semblaient avoir hâte, besoin d’être brûlées. Parfois folie, fureur. Et parfois désespoir. Une Anglaise, menée au bûcher, dit au peuple : « N’accusez pas mes juges. J’ai voulu me perdre moi-même. Mes parents s’étaient éloignés avec horreur. Mon mari m’avait reniée. Je ne serais rentrée dans la vie que déshonorée… J’ai voulu mourir… J’ai menti. »


Le premier mot exprès de tolérance, contre le sot