Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/547

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et, les bras étendus, s’y appliquer de tout son long.

Singulière exhibition, frivole, indécente, par laquelle on lui fit expier son terrible succès populaire. Elle gagna encore l’assemblée par un cruel coup de poignard qu’elle frappa sur Gauffridi, qui était là garrotté : « Maintenant, lui dit-on, où est Belzébuth, le diable sorti de Madeleine ? — Je le vois distinctement à l’oreille de Gauffridi. »

Est-ce assez de honte et d’horreurs ? Resterait à savoir ce que cet infortuné dit à la question. On lui donna l’ordinaire et l’extraordinaire. Tout ce qu’il y dut révéler éclairerait sans nul doute la curieuse histoire des couvents de femmes. Les parlementaires recueillaient avidement ces choses-là, comme armes qui pouvaient servir, mais ils les tenaient « sous le secret de la cour ».

L’inquisiteur Michaëlis, fort attaqué dans le public pour tant d’animosité qui ressemblait fort à de la jalousie, fut appelé par son ordre, qui s’assemblait à Paris, et ne vit pas le supplice de Gauffridi, brûlé vif à Aix quatre jours après (30 avril 1611).

La réputation des Dominicains, entamée par ce procès, ne fut pas fort relevée par une autre affaire de possession qu’ils arrangèrent à Beauvais (novembre) de manière à se donner tous les honneurs de la guerre, et qu’ils imprimèrent à Paris. Comme on avait reproché surtout au diable de Louise de ne pas parler latin, la nouvelle possédée, Denise Lacaille, en jargonnait quelques mots. Ils en firent grand bruit, la montrèrent souvent en procession, la promenèrent même de Beauvais à Notre-Dame de Liesse. Mais l’affaire resta assez froide. Ce pèleri-