Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/571

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se confessait pas à la supérieure (p. 42), chose ordinaire dans les couvents et que les abbesses aimaient fort. Elle se confiait plutôt au vieux David, qui la sépara des autres. Lui-même se confiait à elle dans ses maladies. Il ne lui cacha point sa doctrine intérieure, celle du couvent, l’illuminisme : « Le corps ne peut souiller l’âme. Il faut, par le péché qui rend humble et guérit de l’orgueil, tuer le péché », etc. Les religieuses, imbues de ces doctrines, les pratiquant sans bruit entre elles, effrayèrent Madeleine de leur dépravation (p. 41 et passim). Elle s’en éloigna, resta à part, dehors, obtint de devenir tourière.


Elle avait dix-huit ans lorsque David mourut. Son grand âge ne lui avait guère permis d’aller loin avec Madeleine. Mais le curé Picart, son successeur, la poursuivit avec furie. À la confession, il ne lui parlait que d’amour. Il la fit sacristine, pour la voir seule à la chapelle. Il ne lui plaisait pas. Mais les religieuses lui défendaient tout autre confesseur, craignant qu’elle ne divulguât leurs petits mystères. Cela la livrait à Picart. Il l’attaqua malade, comme elle était presque mourante ; et il l’attaqua par la peur, lui faisant croire que David lui avait transmis des formules diaboliques. Il l’attaqua enfin par la pitié, en faisant le malade lui-même, la priant de venir chez lui. Dès lors il en fut maître, et il parait qu’il lui troubla l’esprit des breuvages du sabbat. Elle en eut les illusions, crut y être