Aller au contenu

Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/586

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sorcière expire[1], l’amour de la stérilité et la peur d’engendrer sont la maladie générale.

Si Satan lit, il a sujet de rire en lisant les casuistes ses continuateurs. Y a-t-il pourtant quelque différence ? Oui. Satan, dans des temps effroyables, fut prévoyant pour l’affamé ; il eut pitié du pauvre. Mais ceux-ci ont pitié du riche. Le riche, avec ses vices, son luxe, sa vie de cour, est un nécessiteux, un misérable, un mendiant. Il vient en confession, humblement menaçant, extorquer du docteur une autorisation de pécher en conscience. Un jour quelqu’un fera (si on en a le courage) la surprenante histoire des lâchetés du casuiste qui veut garder son pénitent, des expédients honteux où il descend. De Navarro à Escobar, un marchandage étrange se fait aux dépens de l’épouse, et on dispute encore un peu. Mais ce n’est pas assez. Le casuiste est vaincu, lâche tout. De Zoccoli à Liguori (1670-1770), il ne défend plus la nature.

Le Diable, au Sabbat, comme on sait, eut deux visages, l’un d’en haut, menaçant, et l’autre au dos, burlesque. Aujourd’hui qu’il n’en a que faire, il donnera ce dernier généreusement au casuiste.

Ce qui doit amuser Satan, c’est que ses fidèles se trouvent alors chez les honnêtes gens, les ménages

  1. Je ne prends pas la Voisin pour sorcière, ni pour sabbat la contrefaçon qu’elle en faisait pour amuser des grands seigneurs blasés, Luxembourg et Vendôme, son disciple, et les effrontées Mazarines. Des prêtres scélérats, associés à la Voisin, leur disaient secrètement la Messe noire, et plus obscène certainement qu’elle n’avait pu être jadis devant tout un peuple. Dans une misérable victime, autel vivant, on piloriait la nature. Une femme livrée à la risée ! horreur !… jouet bien moins des hommes encore que de la cruauté des femmes, d’une Bouillon, insolente, effrénée, ou de la noire Olympe, profonde en crimes et docteur en poisons (1681).