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toujours assise, la faisaient souffrir beaucoup. Par suite de ses convulsions, elle avait une descente, par moments fort douloureuse (p. 343). Ce qui prouve que Girard n’était pas fortuitement criminel, mais un pervers, un scélérat, c’est qu’il ne vit de tout cela que la facilité d’assurer son avantage. Il crut que, s’il en usait, avilie à ses propres yeux, elle ne se relèverait jamais, ne reprendrait pas le cœur et le courage pour démentir son démenti. Il la haïssait alors, et pourtant, avec un badinage libertin et odieux, il parla de cette descente, et il eut l’indignité, voyant la pauvre personne sans défense, d’y porter la main (p. 249). Son frère l’assure et l’affirme, mais brièvement, avec honte, sans pousser plus loin ce sujet. Elle même attestée sur ce fait, elle dit en trois lettres : « Oui. »

Hélas ! son âme était absente, et lui revenait lentement. C’est le 6 mars qu’elle devait être confrontée, confirmer tout, perdre ses frères sans retour. Elle ne pouvait parler, étouffait. Les charitables commissaires lui dirent que la torture était là à côté, lui expliquèrent les coins qui lui serreraient les os, les chevalets, les pointes de fer. Elle était si faible de corps que le courage lui manqua. Elle endura d’être en face de son cruel maître, qui put rire et triompher, l’ayant avilie du corps, mais bien plus, de la conscience ! la faisant meurtrière des siens !

On ne perdit pas de temps peur profiter de sa faiblesse. À l’instant, on s’adressa au Parlement d’Aix, et on en obtint que le carme et les deux frères seraient désormais inculpés, qu’ils auraient leur procès à part, de sorte qu’après que la Cadière serait