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Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/663

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condamnée, punie, on en viendrait à eux, et on les pousserait à outrance.

Le 10 mars, on la traîna des ursulines de Toulon à Sainte-Claire d’Ollioules. Girard n’était pas sur d’elle. Il obtint qu’elle serait menée, comme on eût fait d’un redoutable brigand de cette route mal famée, entre les soldats de la maréchaussée. Il demanda qu’à Sainte-Claire elle fût bien enfermée à clef. Les dames furent touchées jusqu’aux larmes de voir arriver entre les épées leur pauvre malade qui ne pouvait se traîner. Tout le monde en avait pitié. Il se trouva deux vaillants hommes, M. Aubin, procureur, et M. Claret, notaire, qui firent pour elle les actes où elle rétractait sa rétractation, pièces terribles où elle dit les menaces des commissaires et de la supérieure des ursulines, surtout le fait du vin empoisonné qu’on la força de prendre (10-16 mars 1731, p. 243-248).

En même temps, ces hommes intrépides rédigèrent et adressèrent à Paris, à la chancellerie, ce qu’on nommait l’appel comme d’abus, dévoilant l’informe et coupable procédure, les violations obstinées de la loi, qu’avaient commises effrontément : 1º l’official et le lieutenant ; 2º les commissaires. Le chancelier d’Aguesseau se montra très mou, très faible. Il laissa subsister cette immonde procédure, laissa aller l’affaire au Parlement d’Aix, tellement suspect ! après le déshonneur dont ses deux membres venaient de se couvrir.

Donc, ils ressaisirent la victime, et, d’Ollioules, la firent traîner à Aix, toujours par la maréchaussée. On couchait alors à moitié chemin dans un cabaret. Et là, le brigadier expliqua qu’en vertu de ses