Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/679

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L’esprit nouveau est tellement vainqueur, qu’il oublie ses combats, daigne à peine aujourd’hui se souvenir de sa victoire.

Il n’était pas inutile de lui rappeler la misère de ses premiers commencements, les formes humbles et grossières, barbares, cruellement comiques, qu’il eut sous la persécution, quand une femme, l’infortunée Sorcière, lui donna son essor populaire dans la science. Bien plus hardie que l’hérétique, le raisonneur demi-chrétien, le savant qui gardait un pied dans le cercle sacré, elle en échappa vivement, et sur le libre sol, de rudes pierres sauvages tenta de se faire un autel.

Elle a péri, devait périr. Comment ? Surtout par le progrès des sciences mômes qu’elle a commencées, par le médecin, par le naturaliste, pour qui elle avait travaillé.

La Sorcière a péri pour toujours, mais non pas la Fée. Elle reparaîtra sous cette forme qui est immortelle.

La femme, aux derniers siècles occupée d’affaires d’hommes, a perdu en revanche son vrai rôle : celui de la médication, de la consolation, celui de la Fée qui guérit.

C’est son vrai sacerdoce. Et il lui appartient, quoi qu’en ait dit l’Église.

Avec ses délicats organes, son amour du plus fin détail, un sens si tendre de la vie, elle est appelée à en devenir la pénétrante confidente en toute science d’observation. Avec son cœur et sa pitié, sa divination de bonté, elle va d’elle-même à la médication. Entre les malades et l’enfant il est fort peu de différence. À tous les deux il faut la femme.