Page:Michelet - OC, L’Amour, La Femme.djvu/47

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mises aux puissances de la nature. Sachant l’état de l’atmosphère, l’époque du mois, enfin l’action de ces deux choses sur une troisième dont je parlerai, on peut prédire avec plus de sûreté que les anciens augures. On devine presque à coup sûr ce que sera l’humeur de la femme, triste ou gaie, quel tour prendra sa pensée, son désir, son rêve.

D’elles-mêmes elles sont très bonnes, douces, tendres pour celui qui les appuie. Leurs aigreurs, leurs fâcheries, presque toujours, sont des souffrances. Bien sot qui s’y arrêterait. Il faut seulement alors d’autant plus les ménager, les soigner et compatir.

Elles se détendent, regrettent ces tristes moments, s’excusent souvent avec larmes, vous jettent les bras au cou et disent : « Tu sais bien… ce n’est pas ma faute. »

Cet état est-il passager ? Nullement. Partout où la femme n’extermine pas son sexe par un travail excessif (comme nos rudes paysannes qui de bonne heure se font hommes), partout où elle reste femme, elle est généralement souffrante au moins une semaine sur quatre.

La semaine qui précède celle de crise est déjà troublée. Et dans les huit ou dix jours qui suivent cette semaine douloureuse, se prolonge une langueur, une faiblesse, qu’on ne savait pas définir. Mais on le sait maintenant. C’est la cicatrisation d’une blessure intérieure, qui, au fond, fait tout ce drame. De sorte qu’en réalité, quinze ou vingt jours sur vingt-huit (on peut dire presque toujours), la femme n’est pas seulement une malade, mais une blessée. Elle subit incessamment l’éternelle blessure d’amour.