Page:Michelet - OC, L’Amour, La Femme.djvu/90

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Comment se porte-t-elle à ce moment de trouble, à la veille d’une pareille épreuve ?

D’abord elle ne dort guère. On croira, par fatuité, que c’est d’impatience. Généralement, c’est le contraire. La chose la plus désirée, quand elle approche, remplit souvent de crainte et de tristesse, surtout quand il s’agit de déraciner en une fois et de quitter toutes ses habitudes, quand on se voit au seuil d’un si vaste inconnu.

Il est tout naturel qu’elle soit inquiète et agitée, qu’elle ait parfois un peu de fièvre, que la circulation sanguine soit irrégulière ou très rapide, la nutritive lente, difficile à achever. Il faudrait de longue main aviser à tout cela. On pense à autre chose. Souvent elle arrive au moment très souffrante, craintive, dans un état de pléthore douloureuse qui demanderait de doux, de tendres ménagements.


Jeune homme, lis bien ceci tout seul, et non avec cet étourdi de camarade que je vois derrière toi, qui lit par-dessus ton épaule. Si tu lis seul, tu liras bien, tu sentiras ton cœur. Et la sainteté de la nature te touchera.

Ceci c’est de la religion, de la pure, de la vraie. Si tu trouvais ceci un amusement, un sujet de plaisanterie, j’aime autant que tu ries à la mort de ta mère.

Au mariage, ton bonheur est immense, mais combien sérieux ! Respecte-le. Ouvre ton cœur à la gravité sainte de l’adoption que tu vas faire, à l’infinie tendresse que réclame de toi celle qui vient à toi, toute seule et dans une confiance infinie.