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Page:Michelet - OC, Les Femmes de la Révolution, Les Soldats de la Révolution.djvu/272

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LES FEMMES DE LA RÉVOLUTION

Elles n’acceptèrent pas seulement le sacrifice, elles l’aimèrent, elles allèrent au-devant.

L’infortune, la nécessité, qui croyaient leur faire peur, et venaient à elles les mains pleines de glaives, les trouvèrent fortes et souriantes, sans plainte molle, sans injure à la mort.

Le destin tenta davantage. Il frappa ce qu’elles aimaient… Et là encore il les trouva plus grandes, et disant sous leurs crêpes « La mort ! mais la mort immortelle ! »

À cela plusieurs de vous disent, je les entends d’ici : « Et nous aussi, nous serions fortes ! Viennent l’épreuve et le péril ! Les grandes crises nous trouveront toujours prêtes. Nous ne serons pas au-dessous. »

Au danger ? oui, peut-être ; mais aux privations ? au changement prolongé de situation, d’habitudes ? C’est là le difficile, l’écueil même de tel noble cœur !…

Dire adieu à la vie somptueuse, abondante, souffrir, jeûner, d’accord, s’il le fallait. Mais se détacher de ce monde d’inutilités élégantes qui, dans l’état de nos mœurs, semblent faire la poésie de la femme !… Ah ! ceci est trop fort ! Beaucoup voudraient plutôt mourir !


Dans les années dites heureuses qui amenèrent 1848, quand l’horizon moral s’était rembruni tellement, quand l’existence lourde, n’étant point soulevée ni par l’espoir ni par l’épreuve, s’affaissait sur elle-même, je cherchais bien souvent en moi quelle prise