Page:Michiels - Études sur l'Allemagne, renfermant Une histoire de la peinture allemande, 1845.djvu/273

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blasphème contre l’ordre, contre le bien, contre la vérité; mensonge éternel contre l’éternelle grandeur de l’esprit humain.

Les auteurs misanlhropiques se divisent en trois classes. Les uns ont reçu de la nature un caraclère doux et triste; ils souffrent plutôt qu’ils ne s’indignent. La corruption et la folie passent devant ces juges, sans apercevoir de courrotix dans leurs yeux. Mais le blâme qu’ils n’ont point vu les guette silencieusement. Rien ne lui échappe. La douloureuse émotion de l’observateur rend son coupd’œil plus pénétrant, sa mémoire plus tenace. Quand il voudra peindre un vice, ses souvenirs accourront en foule, et le vicieux lui-même sera forcé d’applaudir. On devine que nous esquissons les traits du poète comique. Ces œuvres joyeuses, qui égaient si bien le spectateur, naissent effectivement dans une tête maladive. Swift, Holberg, Cervantes, Molière, Beaumarchais et leurs compétiteurs jetaient sur la vie un regard mélancolique. Ils pleuraient, eux que nul lecteur n’aborde sans rire, et leurs bouffonnes épigrammes sortaient d’une âme désolée. Alceste et Don Quichotte présentent à différents degrés la caricature de cette disposition morale. Tieck l’a burlesquement personnifiée dans le loup qui mange le petit chaperon rouge; enfin Wieland, sans démentir sa légèreté habituelle, promène Agathon au milieu de toutes les scènes qui peuvent ou ébranler la conviction d’un homme